La Grippe A pourrait faire 30.000 victimes en France
Par le Nouvel Obs le 12 mai 2009
La grippe porcine pourrait toucher près de 35% de la population française, et cela pourrait entraîner 30.000 morts. C'est ce qu'a affirmé lundi 11 mai Antoine Flahaut, épidémiologiste et directeur de l'Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) lors d'une conférence à Rennes.
Près de 35% de la population française pourrait être touchée par la grippe porcine, ce qui pourrait entraîner 30.000 morts, a affirmé lundi Antoine Flahaut, épidémiologiste et directeur de l'Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) à Rennes lors d'une conférence.
"Il pourrait y avoir 30.000 décès en France", a
affirmé Antoine Flahaut au cours d'une conférence donnée à l'EHESP, en
évoquant le scénario qu'il estime le plus probable de l'évolution de la
pandémie de la grippe A (H1N1). Selon ce scénario, le pic se fera sentir "après l'été" et pourrait
toucher "35% de la population". En comparaison, la grippe saisonnière
fait selon lui en moyenne 6.000 morts par an.
Interrogée lundi soir sur France 3 sur ces déclarations, la ministre de
la santé Roselyne Bachelot a indiqué que Antoine Flahaut avait "décrit
un des scénarios tout à fait possibles", mais que "l'ensemble de la
communauté des experts médicaux est encore en recherche sur ce qui va
se passer".
"Nous sommes très attentifs à ce qui se passe dans l'hémisphère sud, où
on va être en hiver", a dit encore Roselyne Bachelot. "Cela va présager
sans doute de ce qui va passer dans l'hémisphère nord à l'automne",
a-t-elle ajouté.
L'expert ne croit pas à un scénario de type SRAS,
avec des symptômes apparaissant chez toutes les victimes et des
hospitalisations systématiques. Selon lui, en moyenne, la moitié des
personnes infectées par le H1N1 ne ressentent pas les symptômes de la
maladie.
Il ne croit pas non plus au scénario de type grippe espagnole de
1918/1919 qui aurait fait selon l'OMS au moins 40 millions de décès
dans le monde en raison d'un taux très élevé "de 1 à 3% de cas de
mortalité par rapport aux cas infectés".
En revanche, il rapproche plutôt la pandémie actuelle de la grippe de
Kong-Kong de 1968. "En 1968, il y a eu 30.000 morts, on ne l'avait pas
vu, là on le verra", a-t-il dit, ajoutant que "pour le moment en
France, nous n'avons que des cas d'importation, mais je ne serais pas
étonné que des gens qui n'ont pas eu les symptômes aient transmis" la
maladie.
"Il s'agit d'un virus qui se transmet comme les autres, il n'est pas
exceptionnel, il fait sa besogne", a-t-il expliqué. En moyenne, une
personne contagieuse transmet la grippe à deux autres personnes.
"Si au niveau collectif c'est une grande menace, au niveau individuel
ce n'est qu'une grippe", a-t-il expliqué. "35% de la population malade,
cela peut gripper le système, notamment le système de santé", ajoutant
que "la pandémie, nos pays s'en sortiront sans grands dégâts, ceux qui
vont en souffrir sont ceux qui souffrent déjà, par exemple ceux qui ont
des emplois précaires".
L'OMS doit se prononcer le 14 mai sur le vaccin. L'organisation devra
choisir entre faire entrer le H1N1 souche nord-américaine dans le
vaccin de la grippe saisonnière ou faire un vaccin dirigé contre la
pandémie.
"Mon sentiment est qu'ils vont faire un vaccin pandémique",
a-t-il ajouté sachant que "le nouveau virus est ultra-compétitif et
chassera tous les autres". Selon lui, "en janvier, il n'y aura plus que
du H1N1 sur la terre, le reste aura été dégommé".
"Chaque nation va décider de sa politique et cela ne va pas être
triste, car il n'y aura pas de vaccins pour tout le monde", a encore
déclaré Antoine Flahaut. "Soit on vaccine, comme pour la grippe
saisonnière, les personnes âgées et les plus fragiles, soit on veut
faire barrière au virus et on vaccine les personnes stratégiques, mais
c'est qui les personnes stratégiques ?".