Par Sylvain Lapoix, Marianne 2 , le 17 juin 2009
Çà doit être un fond de rejet de la monarchie : depuis l'élection de
Sarkozy, chaque fois qu'ils sont convoqués en Congrès dans l'aile du
Midi du château de Versailles, les socialistes ne boycottent pas mais
s'abstiennent. Pour le congrès du 22 juin prochain, où le Président
Sarkozy prendra la parole, le groupe PS à l'Assemblée a donc décidé, à
l'unanimité moins deux voix et deux abstentions, une fois de plus de
venir. Mais sans parler. Vous saisissez la nuance? Elle est pourtant de
taille.
A quoi bon demander si Sarkozy refuse ?
Le
4 février 2008, réunis à Versailles pour se prononcer sur le traité de
Lisbonne, députés et sénateurs s'étaient également abstenus (à part
Jack Lang, qui avait bruyamment approuvé le texte européen). Jean-Marc
Ayrault l'avait justifié en expliquant que la formule du boycott «n'était pas satisfaisante».
A ceux qui refusaient le passage par le Parlement du traité de
Lisbonne, le patron du groupe socialiste à l'Assemblée avait répondu « à quoi bon demander un référendum puisque le Président a dit qu'il n'en ferait pas ?».
A sa suite, Martine Aubry a défendu hier la «présence»
à Versailles. Une présence muette, comme d'habitude. L'argument cette
fois-ci ? Le Président n'assistant pas aux discours des neuf groupes,
les socialistes protestent en se taisant. Comme pour le traité de
Lisbonne, le PS entérine le pouvoir de Sarkozy, sa main-mise sur les
institutions : «à quoi bon proposer, puisqu'il refusera ?», «à
quoi bon parler puisqu'il n'écoutera pas !»... Quel courage : de peur
du refus ou du mépris présidentiel, les socialistes ne proposent ni ne
demandent plus rien. Dans l'aile du Midi, ils resteront cois, comme des
enfants boudeurs, vexés du refus de leur père de les laisser jouer dans
la fontaine. Une belle preuve de maturité.
Si on y ajoute le
boycott des écologistes et des communistes, la parole reviendra presque
intégralement à l'UMP et au Nouveau centre. Un véritable instantané de
la politique française et la consécration, à Versailles s'il vous
plaît, du monarque républicain. Sarkozy n'aurait pas osé en demander
autant...